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mardi 29 mai 2012

Why do we do what we do


Some of my choices have been hard to justify lately, since I'm going from a stable situation to a less stable one - from well employed to kind-of, maybe employed. But when I search the core of my choice, I'm okay with it. However,  I'm also in denial. I'm not realizing that I'll be leaving Bethlehem in 4 days, that all my belongings will be packed and ready to go. I need to start realizing, because I do have some packing left to do.

translated graph
I've also been working on a translation this past week. A physics research paper, which is not my forte, but which I am actually, oddly, able to translate thanks to a combination of my own brain and the internet's great language/translation applications. And this job, translating a physics research paper (more specifically, "the acoustics of string instruments"), led me to wonder: why do I like this so much? Translating? And teaching? And theater? And writing? Or, why do I have so many interests and what is it that drives me to work?
I came up with an answer - kind of. I need to digress, for a moment. You know the anecdote where a girl says that she wants to be a singer, yet all she ever talks about is how she envisions her huge house, her pool, her future designer clothes and trophy husband? Well, of course, the moral of the story is that the girl really doesn't want to be a singer, she just wants to be rich. And, in order to be rich, she doesn't necessarily has to be a singer (actually, probably not a good idea at all).

In my case - scoop ahead -  I don't want to be rich. But there is something that drives me, and I'm not sure that what I really want is what I claim to want. When I look at all the things that I enjoy doing in the professional realm, they all involve creating or transforming: I like to make things that previously didn't exist. That's what motivates me. I like to start with a very loose idea and end up with a blog post. I like to see a document in French and end up with a document in English. I like to gather people in a room and create a piece of theater to be performed for others. I like to start with a teaching concept and end up with a lesson plan. I've heard that theater was all about problem-solving, and I agree. But it never occurred to me that theater had problem-solving at its core because the performance itself was the solution. Sometimes, in the midst of it all, we forget.

The Matter of Moments, Feb. 2011, Touchstone Theatre.
Although we are all constantly evolving, changing, contradicting ourselves, I like to come up with finished products that act as little answers. My favorite solutions are artistic, but I like other ones too -  as long as they attempt to answer the key questions that were asked in the first place, and as long as they can morph into new questions that, in turn, need to be addressed.
That sounds a lot like what motivates researchers, doesn't it? Or artists. Yes, artists also seek answers and their creations act as temporary proofs. Research and art - they're not that far apart.
In this century, for some reason, we're asked to choose: one way to explain the world over another. And that's fine - sometimes it's important to make a choice. But I need to remember what motivates me at the very elemental level - why I do what I do, and how can I do more of what I really, really love?
I'll be answering that question for a while.




mardi 26 avril 2011

Serres, Foucault et les démons de la recherche

J'avais promis de parler de procrastination, et voilà que le mois d'avril passe à toute allure, et je n'ai rien écrit. Il faut dire - et je crois que l'excuse est légitime - que je me suis déboitée l'épaule le 10 avril. C'était un dimanche. Sur scène, avec un public devant nous, etc. Mais je n'ai pas crié, j'ai même fini une scène importante pour mon personnage (demande en mariage) et le reste de la troupe a fini la pièce sans moi. The show must go on, or something like that. Mais serieux, ça fait mal ces conneries là. Je ne le souhaite à personne, le déboitement d'épaule.
Enfin bref. Me voilà cloisonnée dans une sorte de brassard. Pas très agréable en ces journées chaudes. Nous avons tous été surpris par la chaleur, qui ne s'était pas manifestée depuis un bien, bien long moment. Et voilà que je porte un brassard thérapeutique (quel est le mot approprié pour décrire ce que je porte?) pour acceuillir le printemps. Ironie du sort.

J'ai écouté deux conférences hier soir, dos à dos, sur internet. Première partie de programme: réflexion de Michel Serres sur la notion d'invention. Deuxième conférence: Michel Foucault donnant un cours au Collège de France, en 1984. C'était sans doute dû à l'enregistrement bruyant du cours ou aux manières acceuillantes de Foucault mais... j'y étais: dans l'amphi numéro 5, surcomplet où les auditeurs étaient debout et assis par terre parce que la salle 6 n'était pas sonorisée... la voix unique de Foucault, et, bien sûr, le cheminement de sa pensée qui nous plonge dans la Grèce Antique. Et de quoi parle-t-il? De courage, bien sûr. Je n'ai pas suffisamment lu son oeuvre pour annoncer, preuves à l'appui, que je suis fan de sa philosophie, mais je crois, tout de même que je le suis. Ou du moins, je suis enthousiasmée par son approche honnête et sans chichi de la réflexion philosophique. Et, de ce que je commence à découvrir, je suis aussi impressionnée par sa capacité à analyser et réfléchir son monde - à retourner les problèmes pour les voir sous un prisme différent. Il utilise une forme d'innocence pour arriver à des conclusions savantes. Son dénuement, sa vulnérabilité face au savoir, me touchent beaucoup.
 Je n'ai pas fini la série de cours, n'ayant jusqu'ici écouté que deux podcasts. Mais Foucault a annoncé dans le deuxième enregistrement qu'il parlerait, au moins un peu, plus tard dans la série, de la paresia, le "dire-vrai", dans un contexte moderne. J'ai donc hâte d'écouter la suite. Je serais bien incapable de résumer ces cours, donc si vous êtes intéressés, ils sont disponibles en ligne.

Sur un plan purement personnel, ce qui m'inquiète, c'est que j'ai soif de recherche en ce moment. J'écoute des podcasts de conférences philosophiques, j'établis des thèses dans ma tête... bilinguisme et théâtre-actualité, fruit d'une culture qui communique l'évènement dans la langue de l'instant. C'est le dernier titre en date.
 Mais je n'aime pas la recherche, merde, ça ne mène pas à ce que je veux faire! N'est-ce pas? Mais, d'un autre côté, j'ai aussi du mal à accepter qu'on travaille tous les jours dans des domaines différents sans prendre le temps de considérer la recherche qui est consacrée à ces domaines. J'envie un peu les médecins qui doivent lire la recherche dédiée à leur profession pour continuer à pratiquer le mieux possible. Ce n'est pas tellement que je les envie, mais je ne comprends pas pourquoi on n'a pas cette habitude, ailleurs. Si on considérait la recherche de manière plus disciplinée dans le monde du théâtre, je suis convaincue qu'on ferait moins d'erreurs, et qu'on créerait un théâtre plus innovant. Je ne veux pas m'enfermer dans une tour d'argent, mais je suis convaincue des vertues de la recherche appliquée à la vie.
D'une certaine façon, mon solo pour Fresh Voices, c'était un peu de la recherche, un peu du théâtre. Peut-être qu'il faut que je regarde dans cette direction:  ne pas m'arrêter, ni de réfléchir, ni de faire du théâtre. Et on verra bien ce qui arrivera.

jeudi 13 janvier 2011

Le Tiers Instruit - la révélation

Je commence à travailler sur le spectacle de Fresh Voices qui va se jouer en février à Touchstone. C'est à nous, les deux apprenties, de monter un spectacle composé de trois "morceaux": le solo de Mariel, mon solo, et notre duo.
Comme j'étais apprentie l'année dernière, je connais les règles: carte blanche, vous vous débrouillez, mais c'est sous-entendu qu'il faut "come up with something good".

Pour mon solo, j'ai envie de parler de l'experience de la double-culture qui aboutit à une tierce culture, souvent innommable et subjective. Je sais qu'il y a pas mal de lecteurs de ce blog qui sont concernés, de près ou de loin, par cette problématique, et je suis toujours curieuse et intéressée d'entendre les experiences personnelles qui en découlent. Donc, partagez, si vous voulez!

J'ai toujours fait partie de deux cultures, et j'ai été bercée par deux - très belles - langues au point de les mélanger pour créer le marasme qu'est le "franglais". Mais j'essaye aussi, autant que possible, de respecter la structure de chaque langue, et j'aime écrire en chacune d'elle.
Mais c'est vrai que quand je réfléchis, les deux systèmes expressifs que sont le français et l'anglais se soudent, se font écho, se relaient dans mon esprit.

Cette notion de mélange culturel qui aboutit à une nouvelle identitée, au delà d'un territoire, a été théorisée par plusieurs penseurs. J'avais déjà entendu parler des expressions "Third cultures kid (TCK)" et "cross-cultural kid (CCK)" et j'avais même navigué sur le site dédié au sujet. Je viens d'acheter en ligne Third Culture Kids: Growing up Among Worlds by David C. Pollock and Ruth E. Van Reken. Je n'étais pas très étonnée d'apprendre que cette partie de la population avait été observée et étudiée, surtout par des sociologues américains (ou, au moins, comptant les Etats-Unis comme un de leur pays de culture).

Mais, alors que je me balladais dans Lyon (il y a de cela une semaine), je suis tombée, par pur hasard, sur un livre qui allait me parler comme peu de livres m'avaient parlé jusqu'ici : Le Tiers Instruit de Michel Serres.
Petit livre de poche posé dans une benne de livres d'occasion, payé 1euro 50 à un libraire qui était en pleine conversation avec quelqu'un, et qui ne s'est en aucune façon aperçu à quel point il avait contribué à me faire comprendre qui je suis.

J'exagère à peine mon enthousiasme et ma surprise. Je crois bien que j'en avais la bouche ouverte, et j'ai du me parler toute seule, audiblement, dans le quartier du vieux Lyon. "C'est pas possible, c'est pas possible, c'est fou...Michel Serres, ça me dit vaguement quelquechose... Michel Serres...". Oui, ça aurait pu me dire quelquechose en effet : académicien, philosophe, sociologue, collègue de Michel Foucault, etc.

J'ai commencé à lire l'essai dans un café, place Bellecour, le soir-même, en attendant qu'Amélie sorte du travail. Et, comme je le fais souvent quand l'enthousiasme me saisit à propos d'une oeuvre, j'ai commencé à recopier des passages, à en souligner d'autres, à écrire des notes dans les marges, des points d'exclamation qui disent "Oui, oui! Je comprends! Je voulais dire ça, moi aussi, mais je n'y étais pas parvenue. Merci!"

Je recopie ici le passage intitulé Naissance du Tiers, parce que mes paraphrases n'atteindraient pas la clarté de l'original :

"  Il parvient à l'autre rive : autrefois gaucher, vous le trouvez droitier, maintenant; jadis gascon, vous l'entendez francophone ou anglomane aujourd'hui. Vous le croyez naturalisé, converti, inversé, bouleversé. Certes, vous avez raison. Il habite vraiment, quoique avec douleur, le second rivage. Le pensez-vous simple? Non, bien sûr, double. Devenu droitier, il demeure gaucher. Bilingue ne veut pas dire seulement qu'il parle deux langues: il passe sans cesse par le pli du dictionnaire. Bien adapté, mais fidèle à ce qu'il fut. Il a oublié, obligatoirement, mais il se souvient quand même. Le croyez-vous double?
  Mais vous ne tenez pas compte du passage, de la souffrance, du courage de l'apprentissage, des affres d'un naufrage probable, de la crevasse ouverte dans le thorax par l'écartèlement des bras, des jambes et de la langue, large barre d'oubli et de mémoire qui marque l'axe longitudinal de ces rivières infernales que nos anciens nommaient amnésies. Vous le croyez double, ambidextre, dictionnaire, et le voilà triple ou tiers, habitant les deux rives et hantant le milieu où convergent les deux sens, plus le sens du fleuve coulant, plus celui du vent, plus les inclinaisons inquiètes de la nage, les intentions nombreuses produisant les décisions; dans ce fleuve dans le fleuve, ou la crevasse au milieu du corps, se forme une boussole ou rotonde d'où divergent vingt sens ou cent mille. L'avez-vous cru triple?
  Vous vous méprenez encore, le voilà multiple. Source ou échangeur de sens, relativisant à jamais la gauche, la droite et la terre d'où sortent les directions, il a intégré un compas dans son corps liquide. Le pensiez-vous converti, inversé, bouleversé? Certes. Plus encore: universel. Sur l'axe mobile du fleuve et du corps frissonne, émue, la source du sens."
pp. 26-27.

Il y a pleins d'autres passages à souligner, et d'images percutantes. Je vais m'en servir, et essayer de convertir certaines de ces idées sur scène en créant des images théâtrales, des atmosphères et des personnages qui parlent du tiers, et de l'universel. On verra ce que ça donne!

samedi 25 décembre 2010

Repas de Noël


Joyeux Noël!

Je suis en France pour les fêtes, donc cela semble logique d'écrire des petits mots en français plutôt que de ne rendre ce blog qu'anglophone.

Mais revenons à nos moutons, et parlons de Noël. Retour à la normale cette année pour ma famille, puisque nous nous sommes réunis de nouveau en France, autour d'une table avec des amis. L'oie, au milieu, trônait avec (matière) grâce jusqu'à ce que nous l'eussent mangée. Les pommes cuites et les marrons faisaient bonne figure à côté de la bête, et le vin affinait les mets. Sans parler du foie gras en entrée, succulent, et du dessert, chocolaté. Des heures à manger, discuter, rire, comater... Noël, quoi. Un festin, un moment qui dure suffisamment longtemps pour qu'on s'en souvienne toute l'année.

Le 22 décembre, j'étais toujours aux Etats-Unis, et maintenant je suis ici, à Paris. Ce parachutage par avion me fait toujours un choc, mais le choc provient davantage du fait que je suis à l'aise - mais vraiment très à l'aise - dans les deux environnements et que c'est presque trop facile de se conformer. Comme si tout mon être se convertissait à l'entrée du pays en question. Et hop, on enfile la casquette française, et hop, la casquette américaine. Bien sûr, je suis ici, à parler de mon mal-être à ce sujet, donc clairement ce n'est pas si facile que ça de changer de nationalité. Mais aux yeux des autres, aux yeux du monde, c'est un jeu d'enfant.

Le repas de Noël, chez nous, correspond davantage à une tradition française : le déjeuner tardif, la nourriture de qualité, le vin, les vannes, et surtout, le temps qu'on passe à table : 3 heures en moyenne.

Malgré le fait que je vois certains avantages liés à l'efficacité de manger à l'américaine, jamais je ne réussirais à concevoir un repas comme un "calorie intake" (littéralement, une "prise de calories") et rien d'autre. Ca m'est arrivé de manger des bêtises à midi, mais je n'appelle pas vraiment ça "manger".

Heureusement pour moi, je viens d'une famille franco-américaine qui aime la bouffe, et qui aime passer du temps à table. Ma mère a beau être américaine, jamais elle ne se lèverait de table de son gré avant la fin règlementaire. Et elle est très souvent partante pour un petit café en fin de repas. Au contraire, je connais des Français qui ont justement émigré aux Etats-Unis en partie pour éviter les festins sans fin dans l'hexagone.

Comme toujours, les simplifications sont traitres et l'on ne peut pas faire de généralisations culturelles sans faire de contresens. Mais on peut quand même dire que la France considère sa cuisine comme un héritage, un patrimoine qu'elle se doit de conserver avec ses rites et ses coutumes. Et aux Etats-Unis, on a tendance à voir la nourriture comme une manière de... se nourrir. Debout, assis, avec couverts, sans couverts, ça n'a pas trop d'importance.

Mais plus qu'un clash culturel, il s'agit d'une différence de tempérament. La déambulation opposée à la ligne droite. Le temps passé à parler opposé au temps passé à agir.

Je pense à ma coloc, toute américaine qu'elle est. Elle prend son temps, fait des pains aux pommes, des tortellinis aux patates douces, et elle savoure. Souvent, elle me rappelle à l'ordre par sa douceur.
Calme-toi, Anne. Assieds-toi, mange avec moi et arrête de bouger.
Alors je m'asseois, et je me rappelle qu'il faut que je prenne mon temps car sinon, tôt ou tard, je finirais par exploser.