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jeudi 9 juin 2011

Opening thoughts on opportunity

I have been meaning to articulate thoughts on the concept of opportunity for quite a while. Currently at work, taking a break after having painted the stage. We paint it regularly to keep it looking good. It's a nice feeling to gaze at a freshly painted stage : pristine, ready to use.
Anyway, it was while I was painting the stage that it occurred to me that a lot of people I knew did favors for me. I benefit from other people's generosity and I'm always a little bit surprised. What led them to offer me (and not necessarily someone else) these opportunities? What state of mind do I project that allows them to trust me?
For example: tonight, I am going to teach a French class in a shop owned by a friend.We hadn't seen each other for a long time, but thanks to facebook, she learned that I was wanting to give lessons, and offered her space on Thursday evenings.
Another example: A mother of a friend has offered her beach house in New Jersey for me and another friend to use during a week-end in September.
In both cases, I never asked for anything. It was merely because the relationship I have with these people allowed these opportunities to happen. A certain amount of trust had been established and this, combined with their inherent generosity led to a class and a holiday.
This may sound a bit "self-helpy" but I'm increasingly realizing how much attitude contributes to one's overall well-being. Bad attitude backfires so much in every aspect of human relationships. And I don't know if people always realize how much attitude weighs on success. Of course, this poses a certain number of problems and inequalities. Because having a good attitude may be a trait of character to a certain extent, but it is fueled by one's  self-confidence and increasing success in different endeavors. Whereas even if someone starts out with a positive outlook on life but is dealt a bad deck of cards, it's only human to become disillusioned. But in turn, it decreases one's chance for positive opportunities. I wonder... if educators were to emphasize the fact that positivity creates a virtuous cycle, would people listen? Instead of making positive feeling all about emotions, could it be viewed and taught as a smart strategy for success?

mardi 26 avril 2011

Serres, Foucault et les démons de la recherche

J'avais promis de parler de procrastination, et voilà que le mois d'avril passe à toute allure, et je n'ai rien écrit. Il faut dire - et je crois que l'excuse est légitime - que je me suis déboitée l'épaule le 10 avril. C'était un dimanche. Sur scène, avec un public devant nous, etc. Mais je n'ai pas crié, j'ai même fini une scène importante pour mon personnage (demande en mariage) et le reste de la troupe a fini la pièce sans moi. The show must go on, or something like that. Mais serieux, ça fait mal ces conneries là. Je ne le souhaite à personne, le déboitement d'épaule.
Enfin bref. Me voilà cloisonnée dans une sorte de brassard. Pas très agréable en ces journées chaudes. Nous avons tous été surpris par la chaleur, qui ne s'était pas manifestée depuis un bien, bien long moment. Et voilà que je porte un brassard thérapeutique (quel est le mot approprié pour décrire ce que je porte?) pour acceuillir le printemps. Ironie du sort.

J'ai écouté deux conférences hier soir, dos à dos, sur internet. Première partie de programme: réflexion de Michel Serres sur la notion d'invention. Deuxième conférence: Michel Foucault donnant un cours au Collège de France, en 1984. C'était sans doute dû à l'enregistrement bruyant du cours ou aux manières acceuillantes de Foucault mais... j'y étais: dans l'amphi numéro 5, surcomplet où les auditeurs étaient debout et assis par terre parce que la salle 6 n'était pas sonorisée... la voix unique de Foucault, et, bien sûr, le cheminement de sa pensée qui nous plonge dans la Grèce Antique. Et de quoi parle-t-il? De courage, bien sûr. Je n'ai pas suffisamment lu son oeuvre pour annoncer, preuves à l'appui, que je suis fan de sa philosophie, mais je crois, tout de même que je le suis. Ou du moins, je suis enthousiasmée par son approche honnête et sans chichi de la réflexion philosophique. Et, de ce que je commence à découvrir, je suis aussi impressionnée par sa capacité à analyser et réfléchir son monde - à retourner les problèmes pour les voir sous un prisme différent. Il utilise une forme d'innocence pour arriver à des conclusions savantes. Son dénuement, sa vulnérabilité face au savoir, me touchent beaucoup.
 Je n'ai pas fini la série de cours, n'ayant jusqu'ici écouté que deux podcasts. Mais Foucault a annoncé dans le deuxième enregistrement qu'il parlerait, au moins un peu, plus tard dans la série, de la paresia, le "dire-vrai", dans un contexte moderne. J'ai donc hâte d'écouter la suite. Je serais bien incapable de résumer ces cours, donc si vous êtes intéressés, ils sont disponibles en ligne.

Sur un plan purement personnel, ce qui m'inquiète, c'est que j'ai soif de recherche en ce moment. J'écoute des podcasts de conférences philosophiques, j'établis des thèses dans ma tête... bilinguisme et théâtre-actualité, fruit d'une culture qui communique l'évènement dans la langue de l'instant. C'est le dernier titre en date.
 Mais je n'aime pas la recherche, merde, ça ne mène pas à ce que je veux faire! N'est-ce pas? Mais, d'un autre côté, j'ai aussi du mal à accepter qu'on travaille tous les jours dans des domaines différents sans prendre le temps de considérer la recherche qui est consacrée à ces domaines. J'envie un peu les médecins qui doivent lire la recherche dédiée à leur profession pour continuer à pratiquer le mieux possible. Ce n'est pas tellement que je les envie, mais je ne comprends pas pourquoi on n'a pas cette habitude, ailleurs. Si on considérait la recherche de manière plus disciplinée dans le monde du théâtre, je suis convaincue qu'on ferait moins d'erreurs, et qu'on créerait un théâtre plus innovant. Je ne veux pas m'enfermer dans une tour d'argent, mais je suis convaincue des vertues de la recherche appliquée à la vie.
D'une certaine façon, mon solo pour Fresh Voices, c'était un peu de la recherche, un peu du théâtre. Peut-être qu'il faut que je regarde dans cette direction:  ne pas m'arrêter, ni de réfléchir, ni de faire du théâtre. Et on verra bien ce qui arrivera.

jeudi 17 février 2011

Veille de première

Veille de première... on joue notre spectacle Fresh Voices: The Matter of Moments demain. J'ai hâte.
Je m'aperçois, avec chaque spectacle, de la chance que j'ai de faire du théâtre, d'avoir l'opportunité de créer des choses qui se dévoilent sur scène. Et ça me conduit à réfléchir de plus en plus à ce que c'est,  exactement qu'une opportunité. Un article là-dessus à venir sur ce blog, j'éspère.

En attendant un billet de blog plus fourni, voici un petit passage du Tiers Instruit de Michel Serres, que je cite directement (le deuxième paragraphe ici retranscrit) dans mon spectacle Where is this Place? :

Ailleurs alors n'est jamais comme ici, nulle pièce ne ressemble à aucune autre, aucune province ne saurait se comparer à telle ou telle et toutes les cultures diffèrent. La houppelande portulan dément ce que prétend le roi de la lune.
Voyez de tous vos yeux ce paysage zébré, tigré, nué, moiré, chamarré, chagriné, fouetté, lacunaire, ocellé, bariolé, déchiré, à lacets noués, à bonnets croisés, à franges mangées, partout inattendu, misérable, glorieux, magnifique à couper le souffle et faire battre le coeur.


jeudi 27 janvier 2011

Identity and displacement


Poster for our show
 Oh dear, oh dear, oh dear. I am in a state today. Not an altogether bad state to be in, but one that is most definitely volatile. I have been working on my Fresh Voices piece for the last two hours and a half now, and I'm at a point where my excitement has become a substantial emotion - it's leaping from my heart, but isn't yet pouring on the page. That's why I decided to pause and jam with you, dear blog readers, and tell you where I am so far in this process. I need gentle ears to listen, and gentle voices to comment, if you feel so inclined.


As I may have said before, for Fresh Voices : The Matter of Moments, I am talking about the experience of being bi-cultural, cross-cultural or even 'third cultural', even if that's not technically how I would be defined, but since my Mom was a "Third culture kid", I qualify as a 'second generation TCK'. And, by working on this solo piece, I am consciously realizing to what extent my life and whole being has been molded by the fact that I come from - and have travelled to and from - multiple places. In addition to Le Tiers Instruit, I have been reading Third Culture Kids: Growing up Among Worlds. Both books touch on the notions of multiplicity, transition, change, uprooting, nomadic existence, movement, etc. in ways that are enlightening to someone who had never been able to pinpoint where (some of) her general angst came from.

And as I am identifying with these concepts, and as I see myself fitting into some of the sociological models described, I feel a renewed freedom to think about my own life and rekindle memories that were and are important even though they may have seemed trite at the time. I still don't know how my Fresh Voices piece is going to be structured, and I really want to come up with a structure tonight (before tomorrow's sharing with company members). But perhaps sharing some of these memories and writing them for readers - rather than merely jotting them down for me - will give me the impetus to find a performative way to get all this stuff figured out.

Here are a few passages I have been working on today.

To have unresolved grief is ignoring the loss one feels. Loss of someone because you moved away and you know you won't stay in touch in the same way. Loss of something like walking to and from the library, through the stately Jardin des Plantes, admiring the busts of great naturalists on the Natural History Museum building. Unresolved grief is not taking the time to say "I miss this" and "I miss that". Unresolved grief is feeling guilty about feeling sad over everything that has changed, that is no longer the way it was.

You dismiss your memories and curse yourself for being 'nostalgic'. If being 'nostalgic' is what you need to do to mourn the loss of what you loved - love -, then, by all means, indulge.

Gleaned from another blog post: "Acte d'auto-censure dont je suis trop capable quand je veux quelquechose" - depriving myself from things. Why? Partly as a way to train myself, for when I'll have to let go of things I love. So sometimes I overthink my wants. Do I really want to do it? What will be the cost, the consequence, of doing this? What amount of pain will I feel once I need to let it/him/her/them go?

Every summer, on my list of "Things to Do while in The United States", there was : "drink at least one frappucino from Starbucks". This was before Starbucks had colonized every country in Europe and set shop in many Parisian buildings (interestingly, when Starbucks established itself in France, while I was a teenager, I decided to boycott the company, instead favoring traditionnal cafés). Other items on the list included "go to a craft store and buy stuff with pocket money", "eat real baked potatoes" (the realness came from the tin foil around the potato and the sour cream on top), "eat chinese food at the food court" and other typical American experiences not to be missed. My mother made sure we did all those things. She instinctively understood our need to relate to the US, and to establish a sense of comfort by reaching for the reassuring little things we knew and enjoyed. So, if the frappucino had not yet been ingested and we were about to leave the continent, my mother made sure I was brought to a Starbucks in the airport for the much enjoyed drink. It became my way of saying goodbye.

And now I live here. And when I go back to France, I stock up on certain things: tea, chocolate, bras, makeup. I hear French all around me and it feels both comforting and stifling, because I know that, from that point on, only my French self counts. On the American side of the ocean, I have no problem displaying my two passports. When I talk to people, I'm confident that they will regard me as specific to myself - maybe American, maybe not, maybe a little. In the States, I sense that my Frenchness is visible in some way. I don't wear it with my accent, but I wear it on my face, with my clothes, in my eating habits. Someone once said I "looked French" - whatever that means- but, I believed him.

In France, not only do I "look French" - again, whatever that means - but I speak French with no accent. I act French too. Polite but distant, not looking at people in the eyes unless I intend to talk to them, reading a magazine that I want to be seen reading [l'Express] rather than the one I really want to read [Glamour]. So, when I enter the French zone, I know that very few people will recognize my other self. And my instinct is to hide the American in me. The blue passport in my bag, the red one in hand.

The moments right after the plane ride are always crystal clear. Past the generic feel of the airport, I spot my mother - her scarf, the lenght of her hair, her signature walk. The embrace, the first few words, the entrance in the parking lot and the sight of her car. Peugeot 309, at least 22 years old by now, everything manual. A white tin can with its distinctive smell. The road from the airport to the appartment. Smaller roads than the wide expanse of those in America. Those American roads always shocked me when I came off the plane and rode in my uncle's car every summer, when we would come to visit. In France, the roads are now punctuated by radars : grey, rectangular boxes placed at strategic points to record speed and deliver fines. My mother rages at them as we pass them by, below the speed limit.
Slowly, everything starts coming back.

jeudi 13 janvier 2011

Le Tiers Instruit - la révélation

Je commence à travailler sur le spectacle de Fresh Voices qui va se jouer en février à Touchstone. C'est à nous, les deux apprenties, de monter un spectacle composé de trois "morceaux": le solo de Mariel, mon solo, et notre duo.
Comme j'étais apprentie l'année dernière, je connais les règles: carte blanche, vous vous débrouillez, mais c'est sous-entendu qu'il faut "come up with something good".

Pour mon solo, j'ai envie de parler de l'experience de la double-culture qui aboutit à une tierce culture, souvent innommable et subjective. Je sais qu'il y a pas mal de lecteurs de ce blog qui sont concernés, de près ou de loin, par cette problématique, et je suis toujours curieuse et intéressée d'entendre les experiences personnelles qui en découlent. Donc, partagez, si vous voulez!

J'ai toujours fait partie de deux cultures, et j'ai été bercée par deux - très belles - langues au point de les mélanger pour créer le marasme qu'est le "franglais". Mais j'essaye aussi, autant que possible, de respecter la structure de chaque langue, et j'aime écrire en chacune d'elle.
Mais c'est vrai que quand je réfléchis, les deux systèmes expressifs que sont le français et l'anglais se soudent, se font écho, se relaient dans mon esprit.

Cette notion de mélange culturel qui aboutit à une nouvelle identitée, au delà d'un territoire, a été théorisée par plusieurs penseurs. J'avais déjà entendu parler des expressions "Third cultures kid (TCK)" et "cross-cultural kid (CCK)" et j'avais même navigué sur le site dédié au sujet. Je viens d'acheter en ligne Third Culture Kids: Growing up Among Worlds by David C. Pollock and Ruth E. Van Reken. Je n'étais pas très étonnée d'apprendre que cette partie de la population avait été observée et étudiée, surtout par des sociologues américains (ou, au moins, comptant les Etats-Unis comme un de leur pays de culture).

Mais, alors que je me balladais dans Lyon (il y a de cela une semaine), je suis tombée, par pur hasard, sur un livre qui allait me parler comme peu de livres m'avaient parlé jusqu'ici : Le Tiers Instruit de Michel Serres.
Petit livre de poche posé dans une benne de livres d'occasion, payé 1euro 50 à un libraire qui était en pleine conversation avec quelqu'un, et qui ne s'est en aucune façon aperçu à quel point il avait contribué à me faire comprendre qui je suis.

J'exagère à peine mon enthousiasme et ma surprise. Je crois bien que j'en avais la bouche ouverte, et j'ai du me parler toute seule, audiblement, dans le quartier du vieux Lyon. "C'est pas possible, c'est pas possible, c'est fou...Michel Serres, ça me dit vaguement quelquechose... Michel Serres...". Oui, ça aurait pu me dire quelquechose en effet : académicien, philosophe, sociologue, collègue de Michel Foucault, etc.

J'ai commencé à lire l'essai dans un café, place Bellecour, le soir-même, en attendant qu'Amélie sorte du travail. Et, comme je le fais souvent quand l'enthousiasme me saisit à propos d'une oeuvre, j'ai commencé à recopier des passages, à en souligner d'autres, à écrire des notes dans les marges, des points d'exclamation qui disent "Oui, oui! Je comprends! Je voulais dire ça, moi aussi, mais je n'y étais pas parvenue. Merci!"

Je recopie ici le passage intitulé Naissance du Tiers, parce que mes paraphrases n'atteindraient pas la clarté de l'original :

"  Il parvient à l'autre rive : autrefois gaucher, vous le trouvez droitier, maintenant; jadis gascon, vous l'entendez francophone ou anglomane aujourd'hui. Vous le croyez naturalisé, converti, inversé, bouleversé. Certes, vous avez raison. Il habite vraiment, quoique avec douleur, le second rivage. Le pensez-vous simple? Non, bien sûr, double. Devenu droitier, il demeure gaucher. Bilingue ne veut pas dire seulement qu'il parle deux langues: il passe sans cesse par le pli du dictionnaire. Bien adapté, mais fidèle à ce qu'il fut. Il a oublié, obligatoirement, mais il se souvient quand même. Le croyez-vous double?
  Mais vous ne tenez pas compte du passage, de la souffrance, du courage de l'apprentissage, des affres d'un naufrage probable, de la crevasse ouverte dans le thorax par l'écartèlement des bras, des jambes et de la langue, large barre d'oubli et de mémoire qui marque l'axe longitudinal de ces rivières infernales que nos anciens nommaient amnésies. Vous le croyez double, ambidextre, dictionnaire, et le voilà triple ou tiers, habitant les deux rives et hantant le milieu où convergent les deux sens, plus le sens du fleuve coulant, plus celui du vent, plus les inclinaisons inquiètes de la nage, les intentions nombreuses produisant les décisions; dans ce fleuve dans le fleuve, ou la crevasse au milieu du corps, se forme une boussole ou rotonde d'où divergent vingt sens ou cent mille. L'avez-vous cru triple?
  Vous vous méprenez encore, le voilà multiple. Source ou échangeur de sens, relativisant à jamais la gauche, la droite et la terre d'où sortent les directions, il a intégré un compas dans son corps liquide. Le pensiez-vous converti, inversé, bouleversé? Certes. Plus encore: universel. Sur l'axe mobile du fleuve et du corps frissonne, émue, la source du sens."
pp. 26-27.

Il y a pleins d'autres passages à souligner, et d'images percutantes. Je vais m'en servir, et essayer de convertir certaines de ces idées sur scène en créant des images théâtrales, des atmosphères et des personnages qui parlent du tiers, et de l'universel. On verra ce que ça donne!